
Série : « La Serbie dans la Grande Guerre » – Jour 3
Après la victoire à Cer, premier succès des Alliés dans la Grande Guerre, la Serbie affronta à l’automne 1914 une nouvelle offensive, encore plus violente. L’armée austro-hongroise, humiliée et stoppée lors de sa première attaque, lança une nouvelle campagne avec l’intention de briser une fois pour toutes la résistance serbe.
En septembre et octobre de cette année-là, le front s’étendait de Gučevo et Mačkov Kamen, en passant par Lešnica et Ljubovija, jusqu’à Višegrad. Cette ligne sanglante, longue de plus de 150 kilomètres, devint le théâtre de l’une des batailles les plus féroces de la Première Guerre mondiale dans les Balkans – la bataille de la Drina.
Une nouvelle offensive contre une Serbie épuisée
La Serbie n’avait eu que quelques semaines de répit. Cer fut une grande victoire morale, mais aussi une source d’épuisement extrême. Dans les tranchées, de nombreux soldats portaient encore les mêmes „opanci“ (chaussures traditionnelles) qu’ils avaient en juillet. Les munitions s’épuisaient, les vivres manquaient, et le typhus commençait à se propager parmi les unités.
L’armée austro-hongroise, sous le commandement du général Oskar Potiorek, rassembla plus de 600 000 soldats et lança une offensive avec trois armées. En face, la Serbie comptait environ 420 000 combattants — pour la plupart des paysans, des instituteurs, des élèves et des volontaires qui, sous la bannière de Karađorđe, défendaient chaque parcelle de leur terre.
Gučevo et Mačkov Kamen – tranchée contre tranchée, baïonnette contre baïonnette
Les combats les plus acharnés eurent lieu sur les montagnes de Gučevo et Mačkov Kamen, entre Loznica et Krupanj. Là, les troupes du général Stepa Stepanović résistèrent pendant des jours aux assauts violents de l’ennemi.
À Mačkov Kamen, du 19 au 22 septembre 1914, les combats se déroulèrent au corps à corps, à la baïonnette et au couteau. Le terrain changeait de mains jusqu’à dix fois par jour. La pluie, le brouillard, la boue et la faim accablaient davantage les soldats.
Lorsque les rapports autrichiens annoncèrent la prise du sommet de Mačkov Kamen, le commandement serbe ordonna une contre-attaque. Après trois jours de combats ininterrompus, le sommet fut repris — au prix de plus de 11 000 morts et blessés.
Des témoins écrivirent plus tard :
« Corps contre corps, baïonnette contre baïonnette – aucune balle ne pouvait décider de l’issue. Seule la force du bras et la volonté de tenir. »
Une montagne d’Herzégovine pleine de héros serbes
Au sud du front, près de Višegrad et Goražde, les divisions du Timok, de la Drina et de la Morava menaient les combats. Les Serbes défendaient farouchement les rives de la Drina, mais durent se replier vers Valjevo sous la pression. Les villes de Loznica, Krupanj et Šabac changèrent plusieurs fois de mains.
L’armée était à bout de forces, mais le moral restait élevé. Dans les tranchées, on entendait des voix devenues légendaires :
« Pour le roi et la patrie – en avant, frères ! »
Retraite et serment avant Kolubara
À la mi-octobre, l’armée serbe, épuisée et meurtrie, se replia vers la Kolubara. C’était une manœuvre tactique – une retraite pour se réorganiser. Bien que l’Autriche-Hongrie annonçât déjà triomphalement que « la Serbie est soumise », les généraux serbes savaient que la bataille n’était pas terminée.
De cette retraite, de la boue et de la douleur de la Drina, naîtra la prochaine épopée héroïque – la bataille de la Kolubara, où l’armée serbe se relèvera et remportera l’une des plus grandes victoires de son histoire.
La bataille de la Drina est restée un symbole de résistance farouche et de persévérance – la preuve que ni la faim, ni la fatigue, ni un ennemi bien plus puissant ne peuvent briser un peuple qui défend sa terre.