
Série : « La Serbie dans la Grande Guerre » – Jour 7
Après les combats rudes et sanglants sur le Kajmakčalan, où les soldats serbes, dans la neige, le vent et le gel, ont percé les positions ennemies et conquis les hauteurs au prix de lourds sacrifices, la voie vers l’intérieur de la Macédoine s’est ouverte. Épuisée mais inébranlable, l’armée serbe poursuivit son avancée, portant non seulement ses armes, mais aussi la foi qu’elle foulerait bientôt le sol de sa patrie.
L’automne 1916 fut une période de combats incessants et de marches épuisantes. Les troupes serbes, aux côtés des unités françaises alliées, progressaient sur des sentiers montagneux boueux, tandis que l’artillerie pilonnait sans relâche les positions ennemies. La pluie, le froid et la maladie fauchaient les soldats, mais leur moral restait indomptable. Chaque hauteur conquise était payée de sang, chaque victoire arrachée après des jours et des nuits dans les tranchées, sous les obus.
Dans les batailles de Grunište, Skočivir et sur les hauteurs au-dessus de Bitola, l’armée serbe fit preuve d’une endurance remarquable. L’ennemi, composé d’unités bulgares et austro-hongroises, défendait ses positions avec acharnement, mais les assauts serbes, guidés par les paroles de leurs commandants et le souvenir de leur patrie perdue, ne faiblissaient pas. Le commandant de la Première armée, le voïvode Živojin Mišić, malgré les blessures et les pertes énormes, refusa de stopper l’offensive.
Le 19 novembre 1916, après des semaines de combats ininterrompus, les unités serbes entrèrent enfin dans Bitola. La ville, dévastée et en ruines, accueillit ses libérateurs. Ce fut la première ville serbe libérée après le calvaire albanais, le premier signe du retour de l’armée au pays. Les rues étaient couvertes de cendres, les églises endommagées, mais leurs cloches sonnèrent à nouveau — pour la première fois en deux ans. Les habitants, peu nombreux, saluèrent les soldats avec des larmes de joie, tandis que les drapeaux serbes furent hissés à nouveau au-dessus de la ville.
Pour la Serbie, la libération de Bitola ne fut pas seulement une victoire militaire. Ce fut un triomphe moral et spirituel, la preuve qu’un peuple ayant traversé l’Albanie, la faim, l’hiver et la mort, avait encore la force de lutter et de vaincre. Bitola devint un symbole de résurrection, un lieu où l’on vit que la liberté pouvait renaître même quand tout semblait perdu.
Bien que le front se soit bientôt stabilisé et que la guerre ait duré encore deux ans, l’esprit né à Bitola ne s’éteignit plus. Dans les tranchées du front de Salonique mûrissait une nouvelle force, une foi en le retour au pays et en le triomphe final, qui viendrait en 1918 avec la percée de Dobro Polje.
Bitola demeure ainsi un mémorial éternel du prix de la liberté — dédié aux soldats qui, après les épreuves les plus dures, apportèrent le premier rayon de victoire et rappelèrent au monde que le peuple serbe ne se rend jamais.